Lettre ouverte au Président de la République pour l’inscription dans la Constitution du principe de précaution en matière de médecine et de santé
Monsieur le Président de la République,
Tandis que la recherche scientifique repousse les limites du progrès médical et que l’offre de médicaments explose, les cinquante dernières années ont vu éclater de nombreux scandales sanitaires qui n’auraient jamais dû se produire.
Des procédures étaient censées faire barrage à des médicaments potentiellement dangereux. Pourtant rien n’a empêché que des êtres humains meurent ou souffrent de façon irréversible dans l’indifférence à cause de la diffusion de médicaments dont la mise sur le marché avait été autorisée et que des médecins croyaient pouvoir prescrire en toute bonne foi, sans faire encourir de risque à leurs patients.
Thalidomide, Distilbène, sang, hormone de croissance, Mediator, Vioxx, Dépakine…. les victimes, parmi lesquelles des dizaines de milliers de femmes enceintes et d’enfants, sont le plus souvent sans recours lorsque ce ne sont pas les procédures judiciaires qui s’éternisent.
Notre propos n’est pas ici de désigner un responsable –c’est un ensemble de choses- mais de trouver une solution pour protéger la population à l’avenir.
En 2005, le Président Jacques Chirac a fait inscrire dans notre Constitution le principe de précaution en matière environnementale.
Sauf à être votée anticonstitutionnellement, toute loi doit désormais respecter l’environnement. Indéniablement il s’agit d’une avancée que personne aujourd’hui ne songerait à remettre en cause. A l’époque, il fallait pourtant oser.
Paradoxalement, le principe de précaution ne vaut pas pour la médecine et la santé.
Le Conseil constitutionnel admet certes que la santé publique soit un objectif mais c’est insuffisant.
Il faut rompre avec l’absurdité du bilan risque/avantage favorable qui n’a pas empêché des catastrophes malgré des procédures d’autorisation de mise sur le marché des produits de santé présentées comme efficaces.
Ce qui vaut pour notre environnement, c’est-à-dire une prise en compte systématique et une forte protection de la qualité de vie, doit également valoir pour notre santé, celle de nos enfants et des générations futures.
La santé de chaque individu doit être garantie au plus haut niveau, sans concession. Comment accepter qu’il en soit autrement ?
C’est notre devoir de citoyen que de réclamer la prise en compte de la santé publique par l’Etat, en permanence, quoi qu’il arrive.
Il est désormais impératif et urgent d’inscrire le principe de précaution en matière de santé et de médecine dans la Constitution, à la place qui lui est naturellement due.
Le président de la République doit être le premier protecteur de la santé des Français.
Nous avons le droit le plus précieux d’exiger des médicaments sans danger.
Le principe de précaution le garantira.
Les laboratoires pharmaceutiques seront d’autant plus vigilants qu’ils engageront leur responsabilité de façon renforcée ; ainsi leurs profits seront mérités et la recherche, encouragée.
Cette avancée restaurera la sérénité.
La France doit montrer l’exemple dans le concert des nations.
Si des médecins l’envisagent, en première ligne c’est par référence au serment d’Hippocrate dont les premiers mots sont : « D’abord, ne pas nuire » (Primum non nocere).
Ce n’est pas une affaire de religion, de tendance politique, d’appartenance ethnique, de catégorie sociale, de niveau de richesse ou d’orientation sexuelle : c’est l’affaire de tous, sans différence, dans le respect de la devise de la France : liberté, égalité, fraternité.
Nous, signataires de la présente lettre ouverte, vous demandons, Monsieur le Président de la République, d’exercer en conscience, avec autorité, sagesse et courage, vos prérogatives pour que le principe de précaution en matière de santé et de médecine soit inscrit dans la Constitution, par la voie parlementaire ou référendaire, afin de nous protéger.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre très haute considération,
Les signataires